Dans quelques jours sortira Pilote, un thriller made in France produit et réalisé par une équipe investie. Un film de genre qui démontre que ce style n’est pas réservé aux américains. Après cette critique vous retrouverez une interview exclusive du réalisateur Paul Doucet.
Pilote arrivera le 10 mai prochain sur OCS dans la case OCS Signature, les créations originales de la chaîne.
Synopsis: Après plusieurs mois de traque, l’armée française au Mali a retrouvé la trace d’une cellule djihadiste locale. Daniel, pilote de drones, et ses hommes couvrent les troupes au sol. Mais au même moment, la famille de Daniel est prise en otage par des terroristes. Ces derniers menacent d’exécuter sa femme et sa fille s’il ne leur obéit pas. Tiraillé entre son devoir et sa famille, Daniel devra faire un choix aux conséquences très lourdes.
La réussite de Pilote réside en deux choses: un scénario puissant et crédible et une équipe (devant et derrière la caméra) de passionnés. Paul Doucet, dont c’est le premier film, ne triche jamais avec ses intentions, s’adapte à son faible budget, connaît ses classiques tout en parvenant à offrir quelques fulgurances. Sa mise en scène est intelligente, on ne s’ennuie pas une seconde. Les moniteurs de drones sont des personnages à part entière et offrent la même adrénaline que les scènes d’actions immersives à souhait. Le scénario monte crescendo, les comédiens livrent de belles partitions (fabuleux Hugo Becker). On reprochera au film sa petite durée, on en aurait bien repris une vingtaine de minutes, et des seconds rôles (les terroristes) en deçà des têtes d’affiche. A l’arrivé, Pilote c’est un grand oui, un tour de force made in France qu’on aimerait voir plus souvent…
Bande annonce:
On vous conseille de voir le film avant de lire l’interview même si cette dernière ne contient aucun spoiler.
Interview.
Watz-up: Bonjour Paul, c’est ton premier long métrage, peux-tu nous raconter le chemin parcouru ?
Paul Doucet: Autodidacte, étude d’ingénieur, mes parents m’ont poussé sur un cursus « normal ».
Passionné depuis toujours par le cinéma, j’ai acheté une caméra et j’ai dépensé toute mes économies pour mon premier court: Bunker, où ma future femme faisait la régie.
J’ai continué dans cette optique avec quelques courts qui m’ont coûté beaucoup d’argent dont mon voyage de noce 😊. Je me suis souvent planté, ça a été une école formidable. 3 courts (avant de savoir écrire) 40-50 000 euros au total. J’ai fait toutes les conneries possibles, cela m’a vraiment formé. Par la suite, mon ami Pascal Sid, m’a réappris les bases de l’écriture et je me suis lancé dans les longs métrages… J’ai rencontré Éric Gendarme et Thomas Lubeau, des producteurs aussi passionnés que moi… Pendant 7/8 ans je leur ai envoyé des scripts, sans succès. J’ai fini par pitché Pilote, ils m’ont dit ok, on a eu 8 mois de développement. Le projet s’est monté vite, on cherchait notre acteur principal, les planètes étaient alignées, nous avons eu la même idée : Hugo Becker. On l’a contacté, il nous a dit oui tout de suite. OCS a suivi, le casting a été rapide… Jean Pierre Bacri est décédé, ils ont repassé Le Sens de la Fête à la télévision, mon épouse m’a dit: « regarde cette actrice, c’est ton personnage »… Eye Haïdara est exceptionnelle, et son duo avec Hugo est parfait.
On a réussi à avoir Grégory Fitoussi, qui, comme Hugo, est le premier à déconner mais quand ils bossent, ils y vont à fond, ce sont des supers acteurs, très investis.
Watz-up: Ces dernières années les films de drones se sont développés et Pilote nous prouve que ce genre n’est pas une exclusivité américaine, comment as-tu eu l’idée du concept ?
Paul Doucet: Ce n’est pas un film de drone, c’est un thriller. Je voulais réaliser un premier film, le concept devait être malin et le sujet pas cher. François Hollande venait de lancer la guerre au Mali, j’ai revu Searching, Buried, Unfrieded qui jouent sur un huis clos avec un concept fort. Je me suis dit bingo. J’ai trouvé ça intéressant d’avoir un pilote de Drone.
Watz-up: Tu as tourné en très peu de jours, comment avez-vous réussi cette prouesse ?
Paul Doucet: Tu pouvais tourner chaque jour avec un acteur et jouer sur le montage mais je trouvais que la tension du jeu n’était pas la même. On a donc voulu tourner en simultané. On a construit 3 décors et nous tournions les champs contre champs en même temps. C’était compliqué à gérer mais les équipes ont été parfaites. On a tourné jusqu’à 35 minutes utiles par jour, c’est énorme.
On a poussé Hugo Becker très loin, il s’est investi, il a suggéré quelques bonnes idées comme celle de la fausse piste de l’hôtel. Mes 4 dronistes ont rajouté des répliques qui fonctionnent parfaitement, c’est le genre de moment que tu ne peux avoir si tu ne tournes pas simultanément. 6 jours à Paris et 3 jours en Espagne. En Espagne nous sommes tombés sur les décors de l’Exodus de Ridley Scott, décors qu’on a transformé en village malien.
Watz-up: Deux idées très bien exploitées ont retenu mon intention: Les moniteurs de drones et les scènes d’assauts, comment avez-vous confectionné tout ça ?
Paul Doucet: On voulait que l’interface des drones soit réaliste pas forcément belle. Krao s’occupe des FX et nous a suggéré de belles idées. On a cherché la crédibilité: l’altitude, les coordonnées GPS, les horaires, les détails sont tous liés à l’action. Il y aura peut-être 3 personnes qui feront attention mais au moins tout est raccord.
Pour les scènes d’assauts, nous avons eu un chorégraphe qui a appris aux acteurs à se déplacer comme des militaires mais sur les scènes d’actions ça ne fonctionnait pas. Je me suis retrouvé à chorégraphier le jour de tournage les scènes d’actions. J’ai pensé aux plans séquences mais ça ne fonctionnait pas.
Peut être que mes années de jeux vidéo m’ont aidées.
Détail amusant, Hugo Becker est venu avec nous en Espagne et il joue un terroriste qui se fait tuer lors de l’assaut 😊. Il m’a même aidé en tant que traducteur, il est trilingue.
Watz-up: Après cette réussite, quelle est la suite ?
Paul Doucet: J’ai plusieurs projets sur la table. Sans en dire trop et sans me comparer, j’aimerai faire comme Nicolas Winding Refn et sa trilogie Pusher, une trilogie sur le même thème. Le script de Pilote 2 existe et il est orienté film de guerre en caméra embarquée. J’ai un film d’auteur et un film historique sur lesquels je bosse, l’avenir nous le dira. Le scénario est le plus important, tu peux être un réalisateur moyen, si le scénario est bon, le film sera bon.
Watz-up: Merci Paul, on va suivre ça de près…
Paul Doucet: Merci Michaël, à bientôt.