Sorti en 2012 sur smartphones et tablettes, Final Fantasy Dimensions n’était pas un jeu dont on attendait beaucoup. Et c’est tant mieux.
Final Fantasy dispensable puisque destiné à un public peu exigeant qui a éventuellement pu percuter sur son prix (près de 23€ au total) et son interface immonde semblant tout droit provenir des origines de RPG Maker (je passe sur son esthétique globale volontairement nostalgique, une affaire de goûts après tout), Final Fantasy Dimensions a vite été oublié par la plupart des joueurs quand ceux-ci n’ignoraient tout simplement pas son existence. Mais les amateurs de musiques vidéoludiques ne savent que trop bien à quel point il est facile de passer à côté d’une prodigieuse bande originale juste parce que le jeu en question n’apparaît pas à la hauteur de nos attentes. L’exemple le plus probant que j’ai à vous fournir demeure celui d’Unlimited SaGa (PS2, 2002), RPG très difficile d’accès et pas forcément hyper bien calibré mais jouissant d’une soundtrack diablement travaillée que l’on doit à Masashi Hamauzu et son programmateur synthé Ryo Yamazaki. Vous venez sans doute de le comprendre, avec Dimensions, vous êtes probablement passés au travers d’un morceau de choix, toute condescendance mise à part.
Si les successeurs de Nobuo Uematsu n’ont su, pu ou même voulu le remplacer en tant que grands ordonnateurs de la symphonie final fantasienne, c’est avant tout car chacun arbore un style bien particulier là où le légendaire moustachu est réputé pour sa grande diversité et maîtrise des genres. Voilà pourquoi Hitoshi Sakimoto (FFXII) et le sieur Hamauzu (FFXIII) ont déçu, mais principalement pour avoir oublié d’insérer des références à, respectivement, Legaia Duel Saga et Unlimited SaGa, rendant ainsi leurs différentes prestations bien moins cultes qu’escomptées. Sauf que, Final Fantasy Dimensions reprenant la formule des FF 8/16 bits, la bande son se devait d’adopter également un schéma semblable. Après Junya Nakano sur FFIV : Les Années Suivantes, c’est Naoshi Mizuta (FFXI, FFXIII-2) que l’on retrouve sur cet opus mobile pour une quarantaine de morceaux dont vous n’attendiez rien, souvenez-vous.
Laissez le charme agir…
« Laissez le charme agir » disait au siècle dernier une publicité qui voulait nous faire croire que l’on pouvait attirer les mouches avec un déodorant. Ce slogan peut finalement montrer son utilité si on se le remémore juste avant d’entamer l’écoute de la bande originale de Final Fantasy Dimensions, démarrant par une reprise du Prelude qui laisse fourbement le thème original s’installer avant de lui superposer de surprenants mais subtils accords au pad. Une technique d’appropriation bienvenue qui sera reprise quelques pistes plus loin avec le thème des Chocobos. La seconde piste fait la part belle aux cuivres avec une progression héroïque mais dont la cuirasse s’effritera le temps d’une poussée conjuguée de cordes et de vents. Deux morceaux de qualité mais c’est véritablement à partir du troisième que l’influence Uematsu commence à fortement se ressentir, avec cette mélodie marquante jouée à la flute sur un entêtant motif à la guitare, une combinaison qui n’aurait pas dépareillé dans l’album solo du maestro, Phantasmagoria.
Les thèmes de combat, maintenant. Le premier se contente de reprendre l’intro à la basse des battle theme de Final Fantasy pour ensuite partir dans une atmosphère rappelant le style de Kenji Ito (Romancing SaGa). Et un peu FFIX, aussi. La musique est courte mais très efficace, quant à la fanfare de victoire, elle emprunte également le travail de Nobuo pour ses premières secondes en se montrant pleine de douceur et de détermination dans sa seconde partie. Les combats finaux souffrent malheureusement de la comparaison avec des œuvres telles que This is the Last Battle (FFIII) et Darkness (FFIX). Entraînants, les thèmes illustrant ces batailles dans Dimensions ne sortent cependant pas du moule et se révèlent bien trop sages et conventionnels pour que cette soundtrack parvienne à s’élever durablement au niveau de celles des premiers Final Fantasy, elle qui y était pourtant brillamment parvenue pendant la majeure partie de sa lecture, aidée en plus par de régulières envolées où Naoshi Mizuta a su agréablement nous perturber avec ses inspirations provenant des confrères cités plus haut.
Bref, on a eu chaud. Final Fantasy Dimensions a failli disposer d’une B.O. culte, Naoshi Mizuta n’a accouché au final que d’une excellente OST, fidèle à l’ADN des premiers jours de la série tout en sachant se montrer rafraîchissante dans son traitement. Une prestation que je vous invite vivement à aller (re)découvrir sur iTunes (11,99€ pour l’achat de l’album complet) pour confirmer en votre for intérieur le talent certain du compositeur. La faculté de ce dernier à rendre chaque piste digne d’intérêt et à y insuffler sa patte (oui) rend son travail particulièrement attachant, même si n’allant pas tutoyer les sommets la faute à des thématiques restant très basiques (vous n’échapperez pas aux traditionnels thèmes d’ouverture, de combat, de victoire, des méchants, auxquels s’ajouteront des thèmes plus légers et d’autres pas grandement significatifs à en juger par leurs titres et le caractère rétrograde du jeu). Un indispensable ? Pourquoi pas. S’il ne l’était pas déjà, Naoshi Mizuta a de grandes chances de se réveiller grand très bientôt.
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