Réalisateur : John Turturro
Acteurs : John Turturro, Woody Allen, Vanessa Paradis, Sharon Stone, Sofia Vergara, Liev Schreiber…
Genre : Comédie d’antan
Date de sortie française : 9 avril 2014
Nationalité : USA
Durée : 1h30
Classification : tout public
John Turturro passe devant et derrière la caméra aux côtés de Woody Allen pour une comédie apaisée.
A première vue, Apprenti Gigolo a tout de l’œuvre narcissique, plus ancrée dans la private joke que dans l’humour populaire. En passant derrière la caméra, John Turturro s’octroie également le premier rôle de sa comédie, dans laquelle son personnage, Fioravante, se voit proposer par un ami anciennement libraire de combler le cœur de ces dames à coups de passes rémunérées. Pourtant, il ressort surtout de ce pastiche allenien (le jazz, les joutes verbales, tout est là) un tendre pragmatisme. D’appartement en appartement, les teintes se veulent douces, jaunes, quasi-sépia, dans la veine du travail de Darius Khondji sur Seven. C’est dans ce milieu new-yorkais nostalgique que se place un trio lucide mais inquiet, composé de Turturro lui-même, de Woody Allen (hilarant) et de Sharon Stone, ex-sex-symbol en proie au doute. Si leur registre est relativement balisé, tout comme le scénario, leur acceptation de leurs rides et de leurs tics leur donnent presque le rang d’Expendables de la rom-com, faisant d’Apprenti Gigolo une œuvre mortuaire apaisée.
John dans tous ses états.
John Turturro a par ailleurs l’intelligence de se reposer en grande partie sur son fabuleux casting, où les plus anciens s’allient aux plus jeunes pour une cohésion folle. De cet ensemble léger et pétillant, Vanessa Paradis tire paradoxalement son épingle du jeu avec son personnage de veuve juive déprimée. Sans non plus lorgner du côté de Terrence Malick, le thème de la temporalité émane d’Apprenti Gigolo, qui contraste les mouvements lents et posés de ses personnages à la surexcitation de Woody Allen. Le temps échappe pendant que les mots fusent. Il s’agit justement du plus bel aspect du long-métrage : montrer des protagonistes qui se moquent de l’avenir, et donc de l’empressement (à l’exception du flic incarné par Liev Schreiber). On ne peut pas rattraper l’impalpable, et le film lance alors sa quête vers une volonté de contact humain, de sensualité apportée par Fioravante. Sans grande prétention, Apprenti Gigolo est ainsi la démonstration d’une œuvre courte (1h30 tout juste) qui parvient cependant à tout raconter avec une certaine désinvolture, sans avoir besoin d’accélérer artificiellement sa narration, comme à l’époque des classiques de la comédie américaine. Si le film commence par la fermeture d’une librairie, il fait partie de ceux qui sentent bon le vieux livre.
S’il ne brille pas par son ambition, Apprenti Gigolo est une sympathique comédie, qui, à travers les mots parfois cinglants de Woody Allen, n’en oublie jamais une certaine élégie en rapport avec le temps qui passe. John Turturro copie plutôt bien son modèle et s’amuse, tout comme le reste de son casting. C’est déjà pas mal.
Bande-annonce : Apprenti Gigolo
Partager la publication « Critique : Apprenti Gigolo (John Turturro, Woody Allen) »